Temps de lecture : 4 min. 20
Aussi banale soit-elle, la tonte des terrains de sports en gazon naturel est certainement l’opération mécanique la plus importante. Il en va de la densité, de la bonne santé et de la qualité générale de la pelouse.
Qui dit gazon naturel dit forcément tonte.
C’est logique, imparable, indissociable dirons-nous.
Toutefois, est-elle exécutée dans les règles, du moins celles imposées par la physiologie du végétal et les exigences de la discipline sportive pratiquée (football, rugby, hockey…) ?
Cette question demeure essentielle, car elle (re)interroge sur les fondamentaux du métier de jardinier et de gestionnaire de stades.
Les réponses par la science, l’expérience et le bon sens agronomique.
En tondant, l’objectif est de réduire la hauteur des limbes du gazon.
Un principe néanmoins : ne pas couper plus d’1/4 de leur hauteur en un seul passage.
La coupe doit également être franche et nette. D’où l’intérêt évident de travailler avec des lames (et contre-lames) parfaitement affûtées, nettoyées et désinfectées. Ne serait-ce aussi que pour limiter la propagation des champignons pathogènes, migrant d’une surface sportive à une autre.
Les champignons… Ennemis publics n°1 sur les stades engazonnés (on pense notamment à la fusariose froide et au Dollar spot), ces derniers méritent toute l’attention des professionnels de la tonte.
Pour réduire la pression des maladies qu’ils engendrent, il est préférable d’éviter de tondre une herbe trop humide.
En effet, les blessures, infligées inévitablement au gazon par les lames des tondeuses, constituent des portes d’entrée favorables pour les champignons, d’autant plus si l’humidité qu’ils affectionnent est importante.
Malgré tout, si la tonte est impérative en condition humide, mieux vaut augmenter la hauteur de coupe, le gazon ne sera que plus résistant, y compris à l’arrachement. Idem en période de forte chaleur afin de limiter l’évaporation.
A bord du tracteur ou de l’autoportée (rotative ou hélicoïdale), le conducteur doit veiller à ne pas rouler trop vite, surtout si le mulching est de rigueur sur les stades.
Il convient également d’alterner le sens des passages de la tondeuse afin d’éviter que le gazon ne se couche, créant ainsi des déformations parallèles dues aux roues. Ne pas oublier non plus de donner un coup de jet d’eau sous le carter après chaque utilisation.
Objectifs : nettoyer le matériel, cela va de soi, mais aussi limiter la propagation des maladies.
En appliquant ces règles de base, le gazon naturel ne peut être que robuste, sain et dense (au point d’être parfaitement concurrentiel vis-à-vis des herbes indésirables).
Une devise : du bon matériel, du beau gazon. Et inversement.
Stars des gazons anglais, les tondeuses hélicoïdales présentent une qualité de coupe supérieure. Son effet ‘ciseau’ sectionne les brins d’herbe avec la plus grande précision, sans déchirement, favorisant ainsi la repousse.
Seulement voilà, les tondeuses hélicoïdales ont quelques points faibles : elles ne sont pas conseillées sur des terrains boueux et/ou peu entretenus, et nécessitent du personnel qualifié pour procéder à l’affûtage et au rodage des lames et contre-lames.
Elles s’avèrent également inadéquates pour couper une pelouse trop haute, par exemple en sortie d’hiver ou à la fin de la trêve estivale, période durant laquelle il est nécessaire de rabaisser la hauteur de coupe.
Ce qui incite les professionnels de la tonte, dans ces conditions, à recourir à des tondeuses rotatives munies de bacs de ramassage.
A bien des égards, les tondeuses à lames rotatives, souvent mutualisées dans les collectivités avec le service en charge des espaces verts, donnent d’excellents résultats pour couper l’herbe haute (et humide). A condition, là aussi, que les lames soient bien aiguisées.
Quid des tondeuses à fléaux (aiguisés) ? Du moins celles utilisées pour couper l’herbe des roughs de golf et des grandes surfaces engazonnées ? Possible, bien que ces machines ne soient pas adaptées lorsque la hauteur de tonte est supérieure à 5 cm. En effet, sous l’action des fléaux, les limbes du gazon ont tendance à se coucher…
Enfin, certains choisissent des robots de tonte. Bonne idée. Mais s’ils s’avèrent très efficaces pour augmenter le tallage, ils sont réputés pour créer du feutre (toutefois extirpé facilement grâce au Joker de Hege ). C’est pourquoi, il est préférable d’opter pour des robots de tonte de grandes largeurs, avérés plus stables, ce qui, indirectement, améliore la qualité de coupe.
Ayant un effet direct sur le roulement et le rebond de la balle, la hauteur de coupe dépend de la discipline sportive pratiquée sur le terrain (football, rugby, golf, polo…) et son niveau de jeu.
Par exemple, il est d’usage, pour un terrain de football, que la hauteur de tonte soit comprise entre 3 et 5 cm. Plus précisément entre 3 et 4 cm pour les terrains d’honneur, et entre 4 et 5 cm pour les terrains d’entraînement.
Du côté des hippodromes, la hauteur de coupe idéale oscille entre 8 et 10 cm. Pour les greens de golf, on parle en millimètres : entre 3 et 6 exactement (seules les tondeuses hélicoïdales simplex ou multiplex en sont capables).
La hauteur de coupe dépend également des espèces et variétés de gazon présentes.
Exemple : 3 à 5 cm pour du ray-grass anglais (l’espèce la plus répandue), contre 2 à 4 cm pour du pâturin des prés. La saison (période active de jeu, trêve estivale ou hivernale) influence aussi la hauteur de coupe.
Dans tous les cas, toujours trouver un compromis entre les exigences du jeu et les besoins physiologiques de la pelouse sportive.
Une tonte trop courte ? Et le gazon réduira sa croissance. Conséquence : la rhizosphère sera impactée, diminuera de volume et fera perdre au gazon ses réserves énergétiques, le rendant moins résistant, que ce soit face aux maladies ou aux aléas climatiques. En revanche, une tonte proportionnée participera à la densité du gazon, à son rendu esthétique et à son développement racinaire.
Petit rappel : en cas de fortes chaleurs, la hauteur de coupe doit être rehaussée de 1 à 2 cm pour augmenter l’activité photosynthétique, l’enracinement et la protection thermique.
Dernier point : la fréquence de tonte. Elle dépend de la croissance des limbes du gazon (ndlr : un ray-grass pousse plus vite qu’un pâturin des prés !), de l’itinéraire technique appliquée (fertilisation, apport de biostimulants, arrosage, opération mécanique d’aération….), des conditions climatiques locales et du matériel de tonte utilisé. Aux gestionnaires qui connaissent bien leurs terrains de sports d’apprécier la fréquence de tonte.
Bien tondu, à la bonne hauteur et à la bonne fréquence, le gazon ne peut qu’accroître son potentiel sportif et esthétique.